L’élégante grue des charpentiers installée !
Le chantier du temple fut fermé officiellement du 15 décembre 2022 au 16 janvier 2023 du fait de la période des fêtes mais aussi des retards enregistrés au niveau du traitement des arbres enfin localisés et acceptés pour leur qualité (voir la chronique du 7 décembre 2022). Des aléas de planning souvent inhérents aux projets d’exception !
Il n’en demeure pas moins que certains travaux furent quand même menés à terme comme le nettoyage complet des combles et son éclairage, permettant aux professionnels et autres visiteurs d’appréhender la charpente dans son ensemble de façon plus confortable.
En décembre une réunion de travail fut organisée entre la mairie et le représentant du maître d’ouvrage Alès-Agglomération, accompagné de l’architecte ; il s’agissait de discuter de la nécessaire rénovation des installations d’évacuation des eaux pluviales du temple, non prévue au départ et prise en charge par la municipalité.
Janvier et février virent plusieurs réunions de chantier qui permirent notamment la mise au point avec l’entreprise de maçonnerie de la réfection des arases extérieures au niveau de la toiture ; la reprise des empochements et sommiers pour le futur calage des poutres maîtresses de la charpente dans les murs fut aussi abordée.
Cinquante pour cent de la couverture du toit a été enlevée, allégeant ainsi la pression sur notre fameuse ferme numéro 6 : celle-ci s’est relevée de quelques centimètres de la voûte du temple ! C’est une bonne nouvelle dans le cadre de son futur démontage et remplacement…
Le huit février dernier c’est par une température glaciale à huit heures trente du matin que la grue attendue par les charpentiers est arrivée au Plan de Brie. La livraison et l’installation sur site furent organisées par l’entreprise familiale Vadori Grue, propriétaire de ce matériel spécifique ; une équipe particulièrement fière de présenter son modèle italien réputé, la Cattaneo CM 415 à télécommande. Neuve, nous apprenons de surcroît qu’Anduze est sa première mission !
Au préalable l’espace devant le péristyle du temple avait été préparé de telle sorte que les quatre pieds de l’engin de vingt quatre tonnes reposent sur d’épaisses et grandes plaques destinées à répartir le poids ; elles-mêmes sont isolées du sol par une couverture de sable ayant pour fonction de niveler les pavés de la chaussée afin d’éviter qu’ils ne se cassent. Les onze contrepoids en béton de 2400 kg chacun, garantie de la stabilité, furent installés et fixés sur le socle métallique de la machine. Un long et gros câble venant de la queue de la flèche fut arrimé à la base des contrepoids.
Une fois ces opérations terminés, le technicien lança le processus de développement général de la grue et nous vîmes grandir, tout doucement, la tour centrale ; puis ce fut le déploiement de la flèche, montrant petit à petit toute l’élégance de la structure métallique. Une force tranquille capable de soulever en une fois jusqu’à 1200 kg.
Un peu avant midi l’affaire était close et il ne restait plus aux techniciens que de remettre les commandes à Stéphane le charpentier, habitué à piloter ce genre d’outil exceptionnel…
À suivre…
Philippe Gaussent
Le 15 février 2023
Une des trois fermes métalliques qui seront changées pour être en bois.
Discussion entre les charpentiers et les maçons avec l’architecte.
Arrivée au Plan de Brie de la grue repliée sur sa remorque.
Arrivée des contrepoids de la grue.
Installation des contrepoids un par un grâce à un solide palan !
Fixation des contrepoids à la grue.
Le gros câble qui file vers le haut jusqu’à la flèche est fixé au pieds des contrepoids.
Lent déploiement du corps de la grue et de sa flèche.
Surveillance du bon déroulement du déploiement.
Les deux techniciens responsables de l’installation de la grue.
La bonne nouvelle de novembre des charpentiers !…
Les dimensions exceptionnelles du temple d’Anduze contribuèrent à la construction d’une charpente en bois particulièrement innovante pour ce premier quart du dix-neuvième siècle.
Celle-ci est composée de six fermes(1) dont les poutres maîtresses horizontales ou « entraits » ont ici une portée hors-norme de vingt mètres !
En 1897 trois de ces fermes furent remplacées pour devenir métalliques ; les causes de ce changement sont inconnues et il s’avère, d’après les constatations actuelles de l’architecte sur les autres restantes en bois, que la charpente n’aurait pas été complètement assemblée à l’origine selon les plans et recommandations de l’époque…
Monument historique oblige et suivant l’avis défavorable de l’architecte Alexandre Autin de conserver une charpente hybride bois/métal, il a donc été décidé d’en réinstaller une totalement en bois.
Quatre des fermes vont être refaites entièrement : bien sûr les trois métalliques, mais aussi la fameuse numéro six en bois qui repose sur la voûte. Les deux dernières seront restaurées.
Si le mois de novembre a vu le commencement de la découverture de la toiture par les charpentiers et la réfection intérieure des arases(2) par l’entreprise de maçonnerie, la meilleure nouvelle fut sans aucun doute la confirmation d’avoir enfin trouvé les cinq grands sapins (quatre plus un en réserve) nécessaires au façonnage des entraits pour les nouvelles fermes !
Des arbres sans défaut qui furent difficiles à trouver, ceux-ci devant répondre à des critères sélectifs rigoureux : un tronc régulier d’une hauteur de plus ou moins quarante cinq mètres avec un diamètre au pied de un mètre dix, leur âge pouvant atteindre entre 150 et 200 ans ; tout cela pour récupérer au final un tronçon d’un peu plus de vingt-et-un mètres pour un diamètre de cinquante centimètres sur toute la longueur.
Les cinq spécimens ont été repérés sur un même lieu, dans une forêt du village suisse de Vallorbe dans le canton de Vaud. L’architecte ne put résister à aller les voir sur place, encore sur pied et dans leur environnement.
De la scierie ils sont partis en Savoie aux ateliers d’Euro Toiture, l’établissement qui gère la construction de la nouvelle charpente ; cette société, spécialisée dans la restauration du patrimoine, a eu la bonne idée d’installer trois jolis panneaux décrivant ses compétences sur la palissade du chantier.
Le mois de janvier 2023 sera riche en évènements puisqu’il verra d’abord l’installation devant le temple d’une importante grue disposant d’une flèche de quarante mètres avec une portée de plus d’une tonne ; son montage durera deux ou trois jours. Ensuite ce sera l’arrivée en convoi exceptionnel des longues poutres servant d’entraits pour les nouvelles fermes…
Philippe Gaussent
Le 7 décembre 2022
(1) Ferme : assemblage précis de pièces de bois destiné à soutenir la couverture du toit)
(2) Arase : élément supérieur d’un ouvrage de maçonnerie qui compense une différence de niveau et qui sert de base à la suite de la construction
Octobre 2022 : le chantier du grand temple se met en place…
Pour les citoyens anduziens et autres visiteurs d’Anduze c’est le début du mois d’octobre 2022 qui aura vu le démarrage effectif des travaux du grand temple : l’installation d’une haute palissade en bois, à claire-voie, sur le Plan de Brie et habillée de grands panneaux explicatifs avec de très belles photos. Elle délimite l’espace de travail nécessaire aux professionnels devant le monument mais aussi la sécurité de cette zone très passante. La pose d’un échafaudage entièrement métallique en façade et sur les côtés hauts de l’édifice permet un accès extérieur à toute la toiture.
Entre-temps, à l’intérieur du temple et après avoir déjà retiré les bancs du rez-de-chaussée depuis plusieurs semaines, il fallut protéger un précieux mobilier difficilement transportable, comme la chaire et la table de communion. Une grande attention fut apportée à l’orgue, appareil fragile nécessitant un « coffrage » particulier : une toile spécifique laissant passer l’air mais aucune particule de poussière fut tendue sur un échafaudage classique en fer entourant l’instrument au plus près. Pour rassurer l’organiste une ouverture est quand même prévue pour que celui-ci puisse de temps en temps accéder aux claviers dans cet espace confiné… mais que le weekend !
À l’origine les deux ailes des anciennes casernes (côté mairie et côté office de tourisme) étaient reliées par un bâtiment avec une grande porte centrale qui donnait sur une cour d’honneur située derrière. Il fut détruit lors de la construction du temple et ses pierres et gravats servirent à rehausser le sol de la hauteur des quatre marches que nous trouvons au péristyle du monument. Une étude du sous-sol fut décidée pour une vérification de sa stabilité et un petit véhicule à chenillettes procéda à un carottage à deux endroits opposés de la grande salle ; les échantillons sont en cours d’analyse.
Le plus pénible de cette préparation aux travaux fut sans aucun doute l’évacuation des nombreux pigeons des combles, vivants et morts, mais surtout le nettoyage des lieux ! Pour parer à tout retour des volatiles, les oculi (ouvertures rondes dans les parois) furent grillagés.
Philippe Gaussent
Le 9 novembre 2022
Photos : P. Gaussent